ACCUEIL
Familiarisation?

Une vie de liens

L’enfant, individu en devenir, se construit dans les liens qu’il entretient au départ avec ses proches, parents et famille. Dans cet environnement, baigné de sons, de parfums, d’odeurs et d’images, il élabore ses premiers repères et donne du sens à ses expériences. Grâce aux réponses qui lui sont adressées dans cette intimité, il est dans une dépendance psychique et émotionnelle et, a un besoin vital de ces liens. Les séparations brusques peuvent être douloureuses pour l’enfant. Afin qu’une séparation puisse être l’occasion pour l’enfant de grandir, de s’ouvrir au monde, elle doit être préparée avec rigueur et centrée sur les besoins de l’enfant. Elle doit aussi considérer les attentes des parents et la qualité de l’accueil proposée par le milieu d’accueil.

Familiarisation ? Adaptation ?

Parler d’adaptation nous renvoie plutôt dans un fonctionnement où l’enfant devrait « s’adapter » à un nouvel environnement sans qu’on ne tienne nécessairement compte de ses besoins majeurs. Se séparer dans un lien sécurisant avec la(les) personne(s) qui va (vont) s’occuper de lui et la continuité de soins maison-milieu d’accueil en font partie. On croyait aussi qu’avec « le temps », parfois assez long, l’enfant allait s’adapter. Les pleurs, l’apathie, le refus de manger, des longues périodes de sommeil… n’étaient pas encore considérés comme signe de détresse et d’insécurité pouvant avoir des conséquences importantes pour son développement psychique.
Aujourd’hui, les objectifs sont différents car il s’agit de tout mettre en place pour permettre aux professionnels de s’adapter eux, à chaque enfant et de proposer des conditions d’accueil adaptées à chaque enfant et sa famille.
L’effort demandé à l’enfant pour « s’adapter » représente un temps infini durant lequel l’enfant ne pourra pas découvrir, expérimenter, avoir du plaisir avec les autres et s’épanouir. Toute son énergie serait concentrée pour faire face à ses émotions débordantes dont il n’a pas encore les compétences nécessaires pour les gérer tout seul.

La période de Familiarisation

La notion de la familiarisation, est en lien avec ce que Françoise Dolto appelait «mamaïsation». Ce sont les parents qui vont « mamaïser » pour que leur enfant puisse, à travers la confiance des parents, se sentir autorisé et en sécurité pour explorer l’espace, pour s’attacher à de nouvelles personnes.
Dès les premiers contacts pour l’inscription de l’enfant, le milieu d’accueil prévoit, avec les parents, une période de familiarisation qui précède l’entrée de l’enfant en milieu d’accueil. La souplesse de son aménagement permettra qu’elle soit adaptée aux besoins de chacun. Cela peut varier d’un milieu d’accueil à l’autre mais un minimum de rencontres, en présence des parents, est indispensable. Les parents peuvent par ailleurs se sentir dans le droit de le demander si jamais le milieu d’accueil ne le propose pas et ce, de manière à favoriser l’élaboration d’une relation de confiance avec le milieu d’accueil.
Différentes étapes seront ainsi envisagées :

1. Une rencontre avec le responsable du milieu d’accueil : étape consacrée à la présentation des démarches d’inscription. La prise de connaissance du Règlement d’Ordre Intérieur, du projet pédagogique, du mode d’organisation de la période de familiarisation à prévoir et souvent, d’une première visite des locaux et de la présentation de (des) équipe(s).
2. Certains milieux d’accueil proposent dans un premier temps, une visite à domicile, si les parents le désirent. L’objectif est de pouvoir les rencontrer dans leur « territoire », de manière plus confortable pour eux.
3. Une quinzaine de jours avant l’entrée de l’enfant, les parents sont invités à passer des moments avec lui dans le milieu d’accueil.

• 4 à 5 fois pendant les 15 jours, les parents sont présents dans le milieu d’accueil, l’enfant ne reste pas seul.
• Parfois, le 1er accueil se passe en dehors de la section, dans une ambiance plus intime, où les parents auront l’occasion de présenter leur enfant à l’accueillant(e) qui va les accueillir tout au long de la familiarisation.
• Ces moments peuvent durer entre 30 minutes et 1 heure.
• En section, les parents pourront partager un moment du séjour des enfants, échanger et poser des questions à l’accueillant(e) et aussi faire connaissance avec les autres membres de l’équipe.
• Ces rencontres sont l’occasion d’affiner la connaissance de l’enfant par les « pistes » données par les parents. Ils pourront, par exemple, montrer comment reconnaître les signes de fatigue de l’enfant, comment l’apaiser si nécessaire, comment il apprécie boire son biberon,…
• Après cette étape, en fonction de l’évaluation qui sera faite en concertation avec les parents, le milieu d’accueil proposera de laisser l’enfant seul progressivement : 1 heure, ensuite 3 heures, puis 1 matinée avec un repas,… jusqu’au moment où l’enfant va rester toute la journée.

Au fur et à mesure qu’une confiance s’installe entre les parents et l’accueillant(e), le nouvel environnement deviendra familier à l’enfant et des liens sécurisants vont se tisser entre ces acteurs. L’enjeu est de veiller à que ces liens puissent se tisser dans le respect du rythme de l’enfant et de ses parents. La période de familiarisation est, pour chacun, l’occasion d’échanger autour des repères qui se sont déjà forgés auprès des adultes que le bébé côtoie précocement et également autour de l’accueil proposé par le milieu d’accueil.
Investir dans ces premiers moments de l’accueil est une condition essentielle pour le bien-être de chacun.

Parents impliqués…

Pour des raisons diverses, les parents doivent souvent prévoir l’accueil de l’enfant avant même sa naissance. Une grande partie des réponses pratiques se retrouvent dans des brochures ONE comme, « Quel milieu d’accueil choisir pour mon enfant ? ». Par ailleurs, plusieurs questions vont apparaître lorsque l’enfant est né et que l’idée de le confier à des professionnels devient plus concrète et plus proche. Parfois, il s’agit de questions simples comme, « Qui va s’en occuper ? » « Comment le repas va-t-il se passer à la crèche » ? « Et si mon enfant est malade ? »… Cependant, d’autres questions ou ressentis ne sont pas toujours si faciles à nommer, à être exprimés par les parents. En toute légitimité, les peurs, les angoisses, la « non-confiance »,… peuvent habiter les parents et doivent être reconnues et respectées.
La présence des parents a tout son sens, dès le départ :

• Ce sont eux qui connaissent mieux l’enfant et donc, ce sont les mieux placés pour donner les informations qui vont orienter les professionnels dans un souci de continuité et de respect,
• La relation de confiance établie avec les accueillant(e)s va permettre à l’enfant de se sentir en sécurité avec eux pendant les heures d’absence de ses parents,
• Les parents ont besoin de temps pour entamer un partenariat avec les professionnels et ainsi pouvoir confier leurs questions, leurs craintes éventuelles et notamment, les aspects auxquels ils tiennent à cœur, lors de l’accueil de leur enfant,
• Les parents ont besoin de sentir qu’ils ont « confié » leur enfant et partir en sérénité.

Pour toutes ces bonnes raisons, les agents de l’ONE soutiennent les professionnels à annoncer, dès le premier contact, l’importance de prévoir cette série des rencontres avant l’entrée définitive de l’enfant. Les parents doivent pouvoir anticiper cette organisation surtout s’ils doivent reprendre le travail.

Et en milieu d’accueil de type familial ?

Les recommandations sont les mêmes mais chez un(e) accueillant(e). Le contexte est différent : une même personne prendra soin de l’enfant dans un groupe plus petit que dans un milieu d’accueil collectif.
Si d’une part, la stabilité du professionnel représente un atout pour garantir une continuité des soins, d’autre part, ce même professionnel a besoin de bien connaître chaque enfant qu’il va accueillir. Il s’agit donc, de prévoir aussi des rencontres avec les parents.
Parfois, vu la proximité géographique et de voisinage, certain(e)s accueillant(e)s met(tent) en place des rencontres singulières, comme des visites à la maternité, des visites à domicile, qui correspondent bien-sûr aux premiers moments de familiarisation. La richesse de ces rencontres sera accomplie par les moments passés au sein du milieu d’accueil auprès de l’accueillant(e) et des autres enfants.

De concert !

Si d’une part, nous avons parlé de l’importance de l’investissement des parents, d’autre part, le rôle du professionnel, lors de ces rencontres, est aussi essentiel.

De plus en plus, les milieux d’accueil s’organisent de manière à permettre qu’un(e) seul(e) accueillant(e) accompagne l’enfant et sa famille dans les premiers jours de la familiarisation.
Malgré toutes les compétences de l’enfant, il ne peut pas s’attacher à plusieurs personnes à la fois et cet attachement est une condition fondamentale pour sa sécurité psychique.
L’accueillant(e) de référence (au moins pendant la période familiarisation) va progressivement faire le relais avec ses collègues qui iront également prendre soin de l’enfant lorsqu’elle n’est pas là.

Pour les accueillant(e)s, les premiers contacts avec les parents vont lui permettre de découvrir l’enfant et sa famille. Parfois, ils connaissent déjà les familles car il s’agit d’un deuxième ou troisième enfant mais cet enfant qui arrive, ils ne le connaissent pas. Pour l’enfant c’est la première fois qu’il découvre cet environnement nouveau ! Dans le respect du rôle de chacun, le professionnel(le) a besoin d’avoir le plus d’informations possibles sur l’enfant dans un contexte de confiance et de sincérité.

Un processus partagé…

L’enchaînement de ces temps de rencontres sera profitable à chacun car :

• l’enfant a besoin que les changements et séparations dans sa vie soient préparés et entourés des liens d’attachement,
• les parents ont besoin de se sentir respectés, en confiance et soutenus dans leur parentalité et
• les professionnels ont besoin de recevoir les « clés » propres à l’enfant qui sera accueilli. Elles seront transmises par les parents dans une relation de partenariat qui permettra à chacun de vivre ce temps d’accueil, en toute sérénité, pour le bien-être de l’enfant.

Pour que l’ensemble de ces conditions puissent se mettre en musique de façon harmonieuse, le temps pris pour les échanges et rencontres est primordial. Lors d’un accueil « d’urgence », ces considérations doivent être prises également en compte afin de guider la réflexion sur d’autres modalités possibles de la familiarisation à mettre en place pour l’accueil de l’enfant.